Ceci est le compte à rebours avant mon retour en France. Pas le retour pour les vacances, celui qui te fait drôlement plaisir parce que tu vas voir tes proches et manger une vraie baguette (si vous saviez le bout de pain dégueulasse qu'on ma servi aujourd'hui...). Je parle du retour avec un grand R et 55 kilos de bagage à trainer. De celui qui veut dire que c'est fini de manger du salmorejo à tout-va (faudrait que je fasse un article "cuisine", tiens!), fini l'odeur de fleur d'oranger, fini l'air de guitare dans la rue, fini d'habiter à Séville. Alors, bien sur, on n'en est pas là, 100 jours, c'est long, on peut faire un sacret montón de choses géniales ! Mais, bon quand même... ce retour, tous, inévitablement, on commence à l'envisager. Et plus on y pense, plus on le redoute. On répète, inlassablement, "ça passe trop vite", mais c'est tellement vrai. J'ai l'impression d'être rentrée de mes vacances de Noël hier. Mais ça fait presque 3 mois, soit autant de temps qu'au premier semestre avant de rentrer en France. A l'époque, même si je n'ai jamais (et heureusement) réellement senti le mal du pays, ça m'avait tout de même semblé plus long. Je revois cette amie prendre, devant moi, ses billets pour venir me voir en avril, en me disant qu'elle n'était pas prête d'arriver. Elle arrive vendredi prochain. Dans ma tête, nous sommes encore fin janvier, début février, à la rigueur. D'où mon étonnement quand j'ai croisé un panneau dans la ville, m'affirmant qu'il faisait 32°. Déjà, on arrive à la moitié du second semestre. L'autre jour, pour la première fois, on s'est demandé quand est ce que l'on allait rentrer. On ne voulait pas y penser avant, mais pourtant, pour éviter les tarifs hallucinants, c'est qu'il ne va pas falloir tarder à l'acheter ce billet d'avion... A nouveau, il faudra cocher "aller simple", et cette fois, le sentiment majeur ne sera pas cette adrénaline stimulante. C'est pas tant qu'on veut pas retrouver ce (ceux) qu'on a laissé en France... c'est ce que ça implique, le problème. Parce que vivre à Séville, c'est incroyable. Et vous savez pourquoi ? Parce que
Séville est incroyable.
Je me souviens de mes premières impressions en arrivant ici. Le trajet à pied que j'ai fait dès le premier jour, je l'ai refait, depuis, dans ma tête, des dizaines de fois. Je regardais les rues, je tentais de les apprivoiser, de faire comme si, moi aussi, j'étais d'ici, en m'arrangeant pour que personne ne me voie regarder mon plan, le moins souvent possible. Ces rues dans lesquelles je passe si régulièrement maintenant, et évidemment, sans plan. Mieux, parfois, on me demande des renseignements, et je sais répondre aux gens :"Le bus pour Nervion ? Prenez le C2, ça ira plus vite". Cette ligne C à laquelle je ne comprenais rien... A l’arrêt de bus, justement, il y a quelques jours, un monsieur qui voulait un renseignement m'a d'abord demandé si j'étais d'ici. Avant, lorsque cela arrivait, je répondais un "plus ou moins" ou un "ça dépend" un peu énigmatique. J'ai pris le risque de répondre "oui". Oui, je suis d'ici. Oui, j'habite à Séville et oui, je peux vous renseigner. J'ai appris à aimer les rares choses qui m'énervaient ici. Le cui-cui des passages piétons : en fait, ça ne gêne que moi, et c'est fou ce que traverser la rue me paraitra terne en France. Les rues dont le nom n'est pas indiqué : on n'a qu'à y flâner, de toute façon, on se retrouvera, c'est pas grand. Les piétons qui squattent la piste cyclable : ah non, ça, je supporte toujours pas. Et l'accent andalou. Mon dieu! (pour être polie!). Cet accent. Je le détestais. Il remettait tout en cause, moi qui pensais me débrouiller en espagnol, j'avais bien du accepter le fait que je ne comprenais rien. Non seulement je m'y suis adaptée, mais en plus, il déteint sur moi. A Madrid, en 3jours, plusieurs fois on 'ma demandé où j'avais appris l'espagnol. Je ne dis pas "Gracias" mais "gracia", je ne dis pas "vamos" mais "vamo" et je ne suis pas en Erasmus, je suis en Eramu, à la "faculta" d'histoire, et surtout pas à la "facultad". J'adore cet accent. Et puis, j'adore Séville.
La devise de Séville, littéralement, est "No me ha dejado", qu'on traduit par "Elle ne m'a pas laissé", sous entendu, "elle ne m'a pas laissé tomber". Ca a un sens historique bien sur, mais bon, vous pensez quand même pas que je le connais suffisamment bien pour vous renseigner, c'est pas comme si j'étudiais l'histoire (en réalité, c'est lié à une conquête, mais je ne sais plus si ça concerne la conquête arabe ou catholique, donc nous voila bien avancés). Moi, je n'en retiens que le sens qui me parle. Séville ne m'a jamais laissée tomber, elle a tenu toutes ses promesses. L'autre soir, un espagnol nous a demandé à une amie anglaise et à moi, "mais vous aimez vraiment Séville à ce point ?", il avait l'air étonné. Ben. Oui. Et dans 2 minutes, et quelques photos, vous aurez compris pourquoi...
Et tant d'autres...
Bon, bref, cet hommage passé, je vais dormir. Comme tous les soirs, j'avais sagement calculé l'heure à laquelle je devais me coucher pour dormir 8h (un samedi soir, quoi...), sauf que je l'ai largement dépassé, et que je me suis rendue compte depuis qu'il y avait ce changement d'heure de motherf****. Demain, j'ai RDV avec la dernière merveille qui manque à mon palmarès : Cordoue. Bisous bisous.
OH, et by the way : quand je dis que ça sent la fleur d'oranger, c'est genre, vraiment, partout, même devant mon immeuble. Franchement, comme vous voulez me faire revenir en France avec ça ?
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